Mais qui fabrique votre masse d’informations insolites vite consommees, mal digerees? Et pour nourrir quel lectorat?

Mais qui fabrique votre masse d’informations insolites vite consommees, mal digerees? Et pour nourrir quel lectorat?

Temps de lecture: 7 min

Pour en etre entendu, nous avons imagine une histoire idiote (vous savez que vous pouvez compter sur nous). Celle d’une jeune fille dotee concernant le dos d’une tache maternel en forme de dragon.

Photoshop a l’appui, nous avons envoye votre faux temoignage –je sens qu’elle fera partie de moi, souvenir d’une vie anterieure, elle me brule quand j’habite en colere, etc.– a HotSpot Media, l’une des nombreuses agences comptables britanniques specialisees dans l’achat d’«histoires vraies». J’ai reponse n’a jamais tarde. Et notre mytho gros comme le Ritz via la Khaleesi dermique a bien failli se retrouver au sein des tabloids anglais.

Dix minutes d’interview au portable et notre interlocutrice paraissait convaincue du potentiel de l’histoire. Quelle que soit qu’elle n’ait aucun sens ou que l’une des photos envoyees provienne de Google Images (et qu’il aurait donc fallu environ dix secondes Afin de decouvrir qu’elle etait bidonnee). Avant de signer le contrat et de ceder les droits exclusifs, nous avons revele la supercherie.

«Nous n’avons pas de base de donnees des taches maternel en forme de dragon, s’est defendue la journaliste. Nous ne pouvions donc nullement verifier que ce histoire est pure avant de vous envoyer 1 photographe.»

Pop urban legends

Fair enough, Albert Londres, sauf qu’a voir les whatsyourprice news publiees par l’agence l’etape photographe est loin d’etre indispensable. Les infos insolites sont de tels boosters d’audience que rares sont nos medias qui resistent a en publier. Quitte a oublier en cours de route quelques regles elementaires de deontologie journalistique, comme Notre verification des sources.

Plusieurs infos payantes

C’est que, dans la course au clic, tout n’est nullement affaire de vertu. Dans une enquete publiee en avril, trois journalistes de BuzzFeed ont demonte des confortables de Central European News (CEN), une simple agence comptables basee a Vienne, mais gros fournisseur de contenus insolites –et apparemment faux. Citations inventees, details croustillants ou photos sorties de un contexte, selon les journalistes de BuzzFeed, CEN ne reculerait devant que dalle pour rendre ses histoires plus sexy. Un modi?le? Le pecheur russe attaque par un ours dont l’aventure a fait le tour de l’univers n’a gui?re ete sauve via sa sonnerie Justin Bieber mais avec l’horloge parlante de le telephone. Un detail qui permet d’ameliorer la viralite de l’histoire, mais qui fait toute la difference entre une info ainsi que la fiction.

Pourtant, Craig Silverman, co-auteur de l’enquete, specialiste du hoax et redacteur a BuzzFeed Canada, tempere:

«Je ne pense pas qu’il y ait beaucoup d’agences qui inventent des histoires ou ajoutent de faux details. Je crois, et j’espere, que CEN est une exception.»

Contacte par Stylist, Michael Leidig, le fondateur de CEN, nie, quant a lui, bien seulement les allegations de BuzzFeed (meme quand il reconnait plusieurs erreurs). Neanmoins, refuse de devoiler ses secrets de fabrication «a un concurrent» (merci pour l’hommage a notre rubrique D’Ailleurs). Il suffira pourtant de se balader un peu sur le Net concernant connaitre les methodes de peche a l’info des pourvoyeurs d’insolite. Talk To The Press, South West News Service (SWNS), HotSpot Media et une pelletee de journalistes freelance, ils paraissent nombreux a vouloir entendre toutes vos recits de perte de poids, d’abus sexuel, de maladie rarissime par exemple histoire buzzable. Comme celle de votre couple transgenre «ou maman est papa et papa est maman», de une telle cherie enceinte qui ne est en mesure de s’empecher de manger une cire pour meubles ou du penis de ce stripteaseur assure a 17 millions d’euros. Un business lucratif qui se donne la faculte de vous Realiser parler.

Ils sont nombreux a vouloir entendre toutes vos recits de perte de poids, d’abus sexuel, de maladie rarissime par exemple histoire buzzable

Sur le website de l’une des principales agences, SWNS, on annonce des tarifs: plus de 250 euros pour une histoire interessante ou inhabituelle, 700 si elle est reliee a l’actu et jusqu’a 14.000 euros si elle implique une celebrite ou une personne publique. Voila qui reste tentant…

Le charme WTF de l’Orient

A Exclusive Pix, une agence de photo britannique qui fournit une bonne partie des tabloids en news people et insolites, on ne bidonne nullement des infos, comme nous l’assure Nick York, le fondateur:

«C’est notre reputation qui est en jeu, ce pourrait i?tre idiot.»

Ses folles histoires, ses journalistes vont les chercher dans le terrain –renseignes par des sources dont il taira des noms et J’ai nature. La recette: un peu d’etrange (tel votre vache a cinq bouches ou ce cochon ne avec une trompe) et beaucoup de conditions physiques rares (comme votre homme dont le c?ur reste au sein d’ l’abdomen). Souvent des nouvelles venues de Chine, de Russie, d’Inde ou d’Indonesie.

«C’est la ou nos histoires etranges se passent. En Europe, l’economie est forte, les individus ont de bonnes routes, des voitures, des services medicaux, des assurances sante. Nous relatons des situations ou les gens ne vont pas pouvoir nullement s’offrir ce genre de choses, et qui sont donc plus enclins a alerter des medias dans l’espoir d’obtenir de l’aide.»

Tete de vainqueur

Meme discours a Quirky China News, une agence photo specialisee en infos decalees made in China. Notre fondateur, Feng Lu, explique se reposer dans une armee de 10.000 journalistes freelance qui couvrent le pays a Notre recherche d’infos incroyables (Gollum surpris dans les montagnes chinoises, un chien enfante via un mouton). Une fois des details recus, l’equipe de Feng Lu se livre a votre fact-checking en bonne et due structure, nous assure-t-il. (Pour info, Gollum etait un acteur de sci-fi en pause pipi.)

A CEN, ils font environ une dizaine de salaries, nous affirme Michael Leidig, repartis en Asie, Amerique du Sud et Europe. Pour le reste, «CEN fonctionne exactement pareil qu’ailleurs. On obtient des infos, on les verifie du mieux qu’on est en mesure de et on les publie si l’on est sur que c’est vrai».

Le cycle de l’info

Et c’est parti Afin de une propagation a vitesse haut debit. Une fois vendue avec l’agence, l’info sera bien souvent parue sous la signature du journaliste qui se chargera de l’editer avant en publier. Avec, Afin de seule source, le credit photo. Et i  nouveau.

«Dans l’heure qui suit, la papier donne naissance a 5 ou dix articles qui renvoient tous a 1 endroit different, remarque Craig Silverman. Tenter de remonter jusqu’a la source originale, c’est souvent tres dur.»